jeudi 21 mars 2013

Types de poèmes ou de strophes : nombre de vers (2)


Huitain : poème ou strophe de 8 vers.
Le plus souvent composé de trois rimes différentes, dont deux sont triplées. Mais, comme ici, on peut coupler deux quatrains en miroir, avec une rime en vers 2 et 4 et en vers 1 et 3 pour le quatrain suivant.


Dites-moi où, en quel pays

Est Flora la belle Romaine,

Archipiades et Thaïs
Qui fut sa cousine germaine ;
Echo, parlant quand bruit on mène
Dessus rivière ou sur étang,
Qui beauté eut trop plus qu'humaine ?
Mais où sont les neiges d'antan ?
François Villon, Ballade des dames du temps jadis




Neuvain : poème ou strophe de 9 vers.
(a-b-a-b-b-c-b-b-c). Mais, au XIXème siècle, la forme est moins rigide (ci-dessous a-a-b-c-c-b-d-d-b).
Moi seul je suis triste ;
Qui sait si j’existe,
Dans mon palais noir ?
Sous la cheminée,
Ma vie enchaînée,
Coule sans espoir.
Je ne puis, malade,
Chanter ma ballade
Aux hôtes du soir.
Théophile Gautier, Chant du grillon II


Dizain (de dixain) : poème ou strophe de 10 vers.
(a-b-a-b-b-c-c-d-c-d, comme si nous avions deux quintils). Mais, on peut trouver d’autres formes, comme ici :
Ainsi allait Léone ainsi Léone allait
Sous un ciel d’encre bleue éclaboussé de lait.
Les amants allaités par ce ciel des mansardes
Déjouaient de la nuit les portes et les gardes
Ils se nouaient ensemble au sommet des maisons.
Leurs pollens écrasés salissent les saisons.
Partout trépigne en haut de l’énigme des villes
Le galop furieux des couples immobiles.
Mais Léone attentive aux rythmes inhumains
Ignore cet amour armé de quatre mains.
Jean Cocteau, Léone 11


Onzain : poème ou strophe de 11 vers.
Souvent : a-a-b / a-a-b / a-a-b / b-a ou encore : a-b-a-b / c-c / d-d-e-d-e. Etc. Avec le vers libre et la disparition des rimes, la forme disparait et seul reste le nombre de vers.
Immense et rouge
Au-dessus du Grand Palais
Le soleil d’hiver apparaît
Et disparaît
Comme lui mon cœur va disparaître
Et tout mon sang va s’en aller
S’en aller à ta recherche
Mon amour
Ma beauté
Et te trouver
Là où tu es.
Jacques Prévert, Immense et rouge



Immense et rouge
© Mapomme


Douzain : poème ou strophe de 12 vers.
(A-b-A-b-c-c c-d-E-E-E-d ou encore A-B-B-A-A-B-c-D-D-c-c-D,  ou bien a-a-B-c-c-B-d-d-E-f-f-E etc.), avec alternance possible de vers de longueurs différentes (le plus souvent deux : 12-6, 12-8, 10-8, 10-6, 8-6, 8-5, etc.)
Mon enfant, ma sœur,
Songe à la douceur
D’aller là-bas vivre ensemble !
Aimer à loisir,
Aimer et mourir
Au pays qui te ressemble !
Les soleils mouillés
De ces ciels brouillés
Pour mon esprit ont les charmes
Si mystérieux
De tes traîtres yeux,
Brillant à travers leurs larmes.
Charles Baudelaire, L’invitation au voyage



Treizain : poème ou strophe de 13 vers.
Le nombre de formules possibles est quasi infini, mais ma préférence va à la forme donnée par Clément Marot ( a-a-b-a-a-b-b-c-c-d-c-c-d, avec le 7ème vers qui marque une ponctuation afin de se placer au centre).
Par l'ample mer, loin des ports et arènes
S'en vont nageant les lascives sirènes
En déployant leurs chevelures blondes,
Et de leurs voix plaisantes et sereines,
Les plus hauts mâts et plus basses carènes
Font arrêter aux plus mobiles ondes,
Et souvent perdre en tempêtes profondes ;
Ainsi la vie, à nous si délectable,
Comme sirène affectée et muable,
En ses douceurs nous enveloppe et plonge,
Tant que la Mort rompe aviron et câble,
Et puis de nous ne reste qu'une fable,
Un moins que vent, ombre, fumée et songe.
Mellin de Saint-Gelais, Treizain

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